Les Petits Mouchoirs

Published on by Etienne

Il y a ceux qu'on abandonne avant même la fin.

Il y a ceux qui se la jouent Morphée.

Il y a ceux qu'on a le courage d'accompagner jusqu'au bout.

Il y a ceux qui nous emmène doucement jusqu'au mot "Fin" sans qu'on s'en rende compte.

Et puis il y a ceux qui nous saisissent par les tripes, par ce qui fait notre condition humaine.

 

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Les Petits Mouchoirs c'est un film de Guillaume Canet alors on sait d'avance qu'on aura toutes les filles normalement constituées sur le coup. Et comme les hommes ne sont pas que des égoïstes immatures sans coeur, ils vont aussi voir ce long métrage dont on leur a dit tant de bien. Souvent, même, ils ont été conseillé par leur mère à qui ils ont rétorqué que "les films français c'est rien qu'des bouses de toute façon" alors que ça les étonnerait "pas qu'un peu d'y aller le voir ce film au titre à la con".

 

"On rit et on pleure"

Mais comme le bouche à oreille est la plus vieille forme de promotion (ou d'avertissement, par exemple : "N'allez surtout pas voir The Expandable") et surtout la plus efficace, nos hommes se sont finalement laissés convaincre. "Mais c'est juste pour Gilles Lellouche que j'y vais."

Après un générique qu'il en avait jamais vu des comme ça, avec le silence et tout et Dujardin sur son scooter dans un Paris qui s'éveille, l'homme sursaute au choc sec brutal. Il s'empresse de toussoter un peu et de faire mine que son dos le gratte affreusement, d'où le brusque mouvement. Mais il est pas au bout de ses peines le pauvre homme. Il va rire, parfois très fort pour marquer sa virilité sur la salle pleine à craquer du Gaumont Opéra, tel le lynx de la savane marquant son territoire à coup d'urine pour dire "même pô peur". Il va sourire, un peu attendri. Heureusement il fait noir ; personne le voit. Le voilà en confiance pour finalement se laisser emporter par une écriture intelligente, lucide, fine et remarquablement précise. Guillaume Canet l'emmène sur l'Atlantique, lui montre sa chambre, trinque avec lui, le fait monter sur son bateau, lui présente ses amis, lui parle à coeur ouvert. Parce que c'est ça les Petits Mouchoirs : un réalisateur et des comédiens qui se déshabillent pour porter tous ensemble l'histoire la plus banale de l'humanité mais aussi la plus difficile à peindre : celle de la nature humaine.

 

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"Z'auriez pas un Klinèxe?"

La force de ces 2 heures 34 minutes est de rendre, grâce notamment au soucis du détail, une histoire ordinaire irrésistiblement captivante. A l'image des romans de Siri Hustvedt, ou d'Anna Gavalda pour les plus Cocorico d'entre vous, l'insoutenable légèreté de l'être (comme disait mon bon ami Milan Kundera) y trône, un peu comme l'homme à abattre ou au moins à capturer afin de tenter d'en retirer des clés de compréhension. Guillaume Canet pose l'homme au centre d'une réflexion affutée et mure.

L'autre point fort réside dans la nature intrinsèque de l'histoire. En parlant de nous, de nos vacances, de nos amis, de nos vies, l'histoire nous touche et nous concerne forcément. Rares sont les films qui maintiennent le spectateur dans un état de tristesse ridiculeusement avancée aussi longtemps. Je pense à la dernière partie du film. D'ordinnaire les larmes montent ou coulent mais toujours de manière éphémère.

 

"Mouais, bof"

A côté d'une lucidité dans l'écriture, on peut cependant regretter la clope et le verre de rouge, greffés aux mains de Marion Cotillard, qui au lieu d'alimenter l'histoire construisent plutôt un cliché. Dommage aussi la certaine facilité dans la réconciliation finale de Juliette et Antoine.

Et dommage surtout, les placements de produits qui nous sortent du film dès qu'on y est rerentré : la télévision Sharp, les basket Nike, le maillot Adidas, la guitare Gibson,... Je ne dis pas que c'est le seul film à le faire et je ne remets pas en question les apports financiers offerts par ce procédé, je déplore seulement l'incessante infiltration de la consommation, même dans une si belle histoire dont on voudrait qu'elle soit pure et qu'elle ne se disperse pas.

 

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Alors, "daube" ou "grand moment de cinéma" ?

Malgré des scènes et des comportements parfois un peu prévisibles et malgré l'arrivée exagérément théâtrale de Jean-Louis et son sac de sable à la fin du film, Les Petits Mouchoirs reste une photographie juste et passionée. A 37 ans, Guillaume Canet nous offre un regard mûr et se met à nu à travers une distribution attachante, même si parfois un peu effacée. François Cluzet est à se tordre de rire quand Gilles Lellouche ne semble pas briller aussi fort qu'il le pourrait. On redécouvre Benoît Magimel avec plaisir tandis qu'on voit Marion Cotillard comme un plat unique, encore et toujours resservi.

Mais c'est là le propre de la création artistique : susciter une subjectivité inévitable.

 

Alors pour ceux qui ne l'auraient pas encore vu, je vous invite à y aller.

Pour les autres, n'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé en laissant un commentaire sur l'article.

Published on Coups de coeur

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M
<br /> <br /> Lynx c'est avec un y!et je remets avec un s, non mais!!<br /> <br /> <br /> <br />
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E
<br /> <br /> Merci! J'ai corrigé c'est bon!<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> <br /> J'ai pleuré comme un bébé à la fin.. j'ai adoré ce film sans vraiment savoir pourquoi. je n'ai jamais regardé ma montre une seule fois dans les 2H34. Du film qui retourne les émotions dans tous<br /> les sens.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
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